Synopsis : Fraichement diplômée, Riley est désormais une adolescente, ce qui n’est pas sans déclencher un chamboulement majeur au sein du quartier général qui doit faire face à quelque chose d’inattendu : l’arrivée de nouvelles émotions ! Joie, Tristesse, Colère, Peur et Dégoût – qui ont longtemps fonctionné avec succès – ne savent pas trop comment réagir lorsqu’Anxiété débarque. Et il semble qu’elle ne soit pas la seule…
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Avec Vice-Versa, Pixar trouvait peut-être son concept le plus fort : plonger dans l’esprit d’une enfant pour incarner les émotions sous forme de personnages hauts en couleur. Le résultat, mélange de récit initiatique, de fable sur la fin de l’enfance et de réflexion psychanalytique, avait séduit les spectateurs, au point d’être maintenant considéré comme l’une des meilleures productions du studio. Neuf ans plus tard, y avait-il encore quelque chose à raconter autour de ce même concept ? Plutôt qu’un bouleversement ou une révolution, Vice-Versa 2 fait le choix de s’inscrire entièrement dans ce qui avait déjà été installé par son prédécesseur. L’intrigue reprend ainsi les grandes lignes de celle du premier opus, en suivant les pérégrinations des émotions de Riley pour rejoindre le centre de son esprit, dont elles ont été renvoyées par d’encombrantes nouvelles venues. Le déroulé scénaristique est proche, tout comme la morale. Chaque émotion a son importance et aucune ne doit être mise de côté. Là où Toy Story 2 et 3 proposaient d’autres points de vue sur le concept initié par le premier film, Vice-Versa 2 choisit la sûreté en restant dans une voie bien balisée. Mais une fois cette relecture passée, ce second opus s’avère riche en idées et en émotions. Émotions pour le spectateur, mais aussi à l’écran puisque quatre nouveaux personnages intègrent l’esprit de l’héroïne : Envie, Paresse, Embarras et Anxiété. C’est sur cette dernière que s’articule toute l’intrigue, en prenant des allures de quête pour l’acceptation de soi-même, ses angoisses et ses névroses. Si les autres émotions sont toutes instantanément drôles et attachantes, seuls Anxiété et, dans une moindre mesure, Embarras, bénéficient d’un véritable développement de personnages. Envie et Paresse font plutôt office de figures comiques, ajoutées à l’intrigue pour la dynamiser et y ajouter des gags.
Sur ce dernier point, la réussite est indéniable tant Vice-Versa 2 est une comédie irrésistible nourrie d’idées originales et bien trouvées. De la faille de sarcasme, à la représentation des crush ou des secrets intimes de Riley, en passant par la nostalgie, les gags enrichissent parfaitement l’univers du film, en plus de s’inscrire dans la thématique du dur passage à l’adolescence. Si la mise en scène de Kelsey Mann, réalisateur du Voyage d’Arlo, n’est pas aussi dynamique que celle de Pete Docter, Vice-Versa 2 reste un festin visuel d’une inventivité folle. L’œuvre animée multiplie les choix de designs marquants, de l’allure de gros hippopotame rose attendrissant d’Embarras au faciès de muppet aussi hilarant que crispant d’Anxiété. À la 3D habituelle du studio, s’ajoutent également des personnages utilisant d’autres méthodes d’animation, notamment de la 2D parodiant à merveille un célèbre dessin pour enfants.
Mais la vraie belle trouvaille de cette suite, c’est bien sûr ce puits à souvenirs où se forment les croyances. Avec une poésie visuelle évoquant l’animation japonaise, Vice-Versa 2 illustre brillamment la manière dont chaque choix et action forge une personnalité et un avenir. C’est là la grande force de cette suite qui, tout comme son aîné, parvient à toucher du doigt l’universalité de la condition humaine, pour la rendre accessible à tous. Toutes les situations et les réflexions qui en découlent résonnent en chaque spectateur, qui y associera ses propres souvenirs et expériences. On s’identifie dès lors pleinement à Riley et des situations en apparence anodines, comme une simple soirée entre amies, deviennent source d’émotions et de tension insoupçonnable.
Le long-métrage parvient brillamment à rendre limpides des concepts psychologiques et spirituels tortueux, de la mémoire sélective aux angoisses existentielles, en passant par la culpabilité ou la naissance des rêves. Avec malice et poésie, les magiciens de Pixar parviennent ainsi, le court temps d’un film, à plonger dans nos esprits complexes pour nous permettre de mieux nous comprendre nous-mêmes.
Même s’il ne se risque jamais à marcher hors des pas de son aîné, Vice-Versa 2 reste une réussite, extrêmement plaisante. Si Pixar semble avoir perdu un peu de son audace avec le temps, leur petit dernier prouve qu’ils sont toujours maîtres dans l’art d’emporter adultes et enfants dans un récit universel.
Timothée Giret
- VICE-VERSA 2
- Sortie salles : depuis le 19 juin 2024
- Réalisation : Kelsey Mann
- Avec les voix de : Amy Poehler, Lewis Black, Liza Lapira, Tony Hale, Phyllis Smith, Maya Hawke, Paul Walter Hauser, Adèle Exarchopoulos, Ayo Edebiri, Diane Lane, Kyle MacLachlan…
- Scénario : Meg LeFauve, Dave Holstein
- Production : Mark Nielsen
- Photographie : Adam Habib, Jonathan Pytko
- Montage : Maurissa Horwitz
- Musique : Andrea Datzman
- Distribution : Walt Disney Pictures
- Durée : 1 h 36