Synopsis : Dans les années 60, Joe, un adolescent de 14 ans, assiste impuissant à la lente dégradation des rapports entre son père et sa mère.
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Après sa projection en première mondiale à Sundance, le premier long métrage de l’acteur américain Paul Dano (Little Miss Sunshine, There Will Be Blood, Swiss Army Man) fait l’ouverture de la Semaine de Critique au 71e Festival de Cannes. Wildlife, inspiré d’un roman de Richard Ford sur un scénario co-écrit par Paul Dano et Zoé Kazan, nous entraîne dans le Montana des années 60. Joe est un adolescent sensible qui voit sa mère prendre son destin en main après le départ de son père. Il tente de maintenir l’équilibre au sein d’une famille dysfonctionnelle où il assiste, impuissant, à la lente dégradation des rapports conjugaux. Son père (Jake Gyllenhaal), qui ne cesse de faire déménager la famille à la recherche de nouveaux emplois, accepte un travail de sapeur-pompier pour combattre les incendies de forêts et quitte le domicile. Dano concentre alors son attention sur la relation entre Joe et sa mère, laquelle prend conscience qu’elle doit s’affranchir rapidement de son rôle de femme au foyer, révélant progressivement une personnalité plus affirmée et libérée. À l’instar de ses précédents rôles, Mulligan est dans l’émotionnel dégageant toute la fragilité et le désespoir d’une femme prise au piège d’une Amérique des années 60 en mutation. Dano esquisse suffisamment les problèmes de société en toile de fond pour comprendre la répression des femmes dans la culture de l’époque, tout en interrogeant sur la profondeur du malheur dans le mariage. Les meilleures perspectives d’emploi qui s’offrent à elle pour s’en sortir se résument à être secrétaire ou institutrice suppléante, la troisième option étant de courtiser un riche concessionnaire automobile local (Bill Camp) pour subvenir à ses besoins. Mais à travers sa colère, cet abandon et cette séparation, cette femme voit l’opportunité d’accéder à ses envies d’émancipation et de se libérer d’une vie familiale ingrate. Face à elle, Ed Oxenbould (aperçu dans The Visit), avec son visage angélique, reste étonnement sage, posé et calme face à cette situation fébrile qu’il ne comprend pas, tout en exprimant l’inquiétude d’un avenir incertain. Il n’éprouve jamais de colère envers sa mère, se démenant pour toujours trouver un moyen de resserrer les liens familiaux. Paul Dano privilégie ici la caméra fixe dans des cadres épurés, des décors impersonnels et des tons mesurés, soulignant la nature banale du drame, qui ne font qu’accentuer l’opacité de cette histoire émotionnellement délicate. L’ensemble du casting fonctionne, bien que la psychologie des personnages masculins ne soient pas toujours très bien approfondis. Jake Gyllenhaal tire malgré tout son épingle du jeu à travers l’archétype de ce père dont l’unique rôle est de donner une vie meilleure à sa famille. Dano parvient ainsi à extraire son récit des thématiques récurrentes du cinéma indépendant américain et signe une première oeuvre subtile et prometteuse.
- WILDLIFE
- Sortie salles : 19 décembre 2018
- Réalisation : Paul Dano
- Avec : Jake Gyllenhaal, Carey Mulligan, Ed Oxenbould, Bill Camp, JR Hatchett, Cate Jones, Marshall Virden, Zoe Margaret Coletti
- Scénario : Zoe Kazan, Paul Dano, d’après le livre de Richard Ford
- Production : Andrew Duncan, Alex Saks, Jake Gyllenhaal, Riva Marker, Oren Moverman, Ann Ruark, Paul Dano
- Photographie : Diego Garcia
- Montage : Louise Ford, Matthew Hannam
- Décors : Melisa Jusufi
- Costumes : Amanda Ford
- Musique : David Lang
- Distribution : ARP Sélection
- Durée : 1h44